Cette photo a été prise en 1942 à l’occasion du 25e anniversaire du mariage de Jan de Wit et Johanna Seignette. De g. à dr. : le père Jan de Wit, puis leurs enfants Jo, Aaf, Annie et Jan. La personne tout à droite est « la mère Hanna », Johanna Seignette.
La fille aînée, Annie de Wit (60),
notre (belle-)mère et grand-mère
Les deux autres filles, Aaf en Jo
Le fils cadet, Jan
Il est assez difficile d’écrire quelque chose sur une personne telle qu’Annie. C’est que son souvenir est toujours tellement vivant dans nos cœurs bien que ça fasse déjà 30 ans qu’elle est décédée. Récemment, nous avons pris connaissance d’une lettre qu’elle a écrite à sa meilleure amie, en 1944. Cette lettre est tellement particulière et nous donne une image si frappante de l’époque, que nous la citons en entier ci-dessous :
Afra de Wit (1925- ✝2014)
x Piet Dijkman ✝
Dans son enfance, Aaf de Wit a fréquenté un pensionnat à Bergen (Pays-Bas) où toutes les jeunes filles de la bourgeoisie aisée de cette époque recevaient une éducation très complète. Vers 1945, elle s’est mariée avec Piet Dijkman. Le couple habitait une ferme à Heemskerk qui, malheureusement, a été peu à peu encerclée par de nouvelles constructions. Plus tard, la ferme est devenue connue comme la « Bowlingboerderij » (la ferme avait été transformée en bowling). Quant à Aaf, elle a travaillé dans un centre de soins, jusqu’à ses 65 ans.
Johanna de Wit (1927)
x Johannes Petrus (Jan) Brandjes
21 sept. 1924 - ✝ 2 mars 2008.
Vers 1958, Jo s’est mariée avec Jan Brandjes. Ils se sont installés à Castricum (Pays-Bas) et y ont monté ensemble une entreprise de transport.
Ils ont eu 4 enfants :
Dirk, Jan, René en Peter.
Jan de Wit (2 décembre 1930) s’est marié, le 2 octobre 1957, avec Eva Brandjes (19 avril 1931).
Jan de Wit a repris la ferme de son père.
Heemskerk (Pays-Bas), le 15 décembre 1944
Chère Anny,
Salut Anny, voilà enfin de petites nouvelles en provenance de Heemskerk. C’est scandaleux, hein, d’avoir tellement tardé. Pour m’excuser, je peux vous dire que nous avons été très occupés ces derniers temps, pourtant, ce n’était pas avec l’écrémage et barattage du lait, tu sais, nous le faisons peu ces derniers temps. Non, c’est la vente directe du lait qui est actuellement très importante, on dirait que nous avons un commerce à la maison. Tous les jours, énormément de gens viennent frapper à notre porte pour nous demander de la nourriture ; continuellement, ça n’arrête jamais. Nous vivons des temps horribles, n’est-ce pas ? Comment cela finira-t-il, Anny... On n’a plus de moyens pour soulager toute cette misère, hein. On a également été évacués, ainsi que le Presbytère et les Sœurs. Nous devions tous partir. Heureusement, cela n’a pas trop duré. Nous avons encore pu emporter des meubles et des vêtements ; tout a été mis en sécurité dans la maison de Jan de Wit, puisque la famille de Wit avait eu la permission de rester chez eux. Durant la journée, nous restions secrètement à la maison, les volets de la façade bien fermés, comme si nous étions partis. Le soir, nous pouvions dormir chez la famille de Wit. Après quelque temps, et petit à petit, tous les gens sont rentrés chez eux et nous aussi.
Pendant quelques semaines, des garçons provenant d’Amsterdam ont logé ici. Ils avaient pris la fuite à cause des rafles, mais, puisque rien n’arrivait, ils ont finalement décidé de partir. Ils nous étaient tout à fait inconnus, ce n’étaient d’ailleurs même pas des catholiques ; pourtant, vraiment des garçons bien élèves, tu sais ! Nous recevons souvent des personnes qui ont besoin d’être nourries et hébergées, ce sont tous des gens qui se rendent à pied vers le nord du pays, avec de petites charrettes. Ils viennent parfois de très loin, de La Haye ou de Leyde [ndlt : villes néerlandaises]. C’est bien horrible, n’est-ce pas, Anny, on devient vraiment triste, hein, en voyant toute cette misère. Comment cela va-t-il finir ?
On peut bien voir que ces deux garçons sont des frères de Jan, n’est-ce pas ? C’est pourtant bien triste qu’ils n’aient pas pu trouver grand-chose pour s’approvisionner, dis, là-bas, dans le polder Wieringermeer [ndlt : polder dans la partie Nord de la province de la Hollande-Septentrionale] ; il n’a guère été la peine de faire un tel voyage. Maintenant, nous n’avons plus de lit disponible pour eux, puisque tous les lits sont occupés ; nous avons un valet de ferme pour jour et nuit à la maison, et c’est lui qui dort dans le lit clos (que nous appelons « la petite carrosse »), mais on trouvera certainement de la place pour eux, quelque part.
J’ai bien cousu mon manteau, dis, Anny. Mais, à l’heure actuelle, on n’a guère la tète ni le cœur à se procurer de nouveaux vêtements, hein. Et je ne me suis toujours pas fiancée, dis, Anny. Nous attendons encore un peu, tu sais. Ici aussi, on est continuellement avertis qu’il y aura des rafles, c’est pourquoi beaucoup de garçons ne passent plus la nuit chez eux.
Bon, Anny, je vais finir, hein, parce qu’il est vraiment désagréable d’écrire à la faible lumière lugubre d’une de ces lampes à pétrole. Eh bien, Anny, je vous souhaite tous ce qu’il y a de mieux, hein, et j’espère que nous nous reverrons en paix bientôt, hein. Beaucoup de salutations cordiales à tous et toutes, de la part de nous tous, mais surtout de moi. Saluuuut, hein !
Anna Maria (Annie) de Wit était née le 19 février 1919 à Heemskerk (Pays-Bas). Elle est décédée le 30 janvier 1980.
Le 23 janvier 1947, elle s’est mariée avec Johannes (Jan) de Wit.
Jan de Wit était né le 24 janvier 1917 ; il est décédé le 7 novembre 1988.
Ci-dessus :
Annie, vers 1920 et 1938
À droite - vers 1942
de g. à dr. : Jan,
l’oncle Lou, Aaf, Mien Groenland, Jo et Annie
Ci-dessous – vers 1944
Une fête avec des amis,
Annie se trouve au milieu de la photo
Annie et Jan de Wit ont eu 7 enfants : Jan, Joop, Sjaak, Hanneke, Loek, Nia et Peter.
Ils ont d’abord habité à la [rue] Kleine Houtweg à Heemskerk où Jan possédait et exploitait une entreprise agricole mixte. Il était, à la fois, fermier, maraîcher/horticulteur et bulbiculteur. Les jardins se trouvaient derrière la maison, les prés étaient plus loin à Heemskerk, dans le Meent (le pâturage communal).
Pendant des années déjà, Aaf est une source d’inspiration pour bien des gens, grâce aux nombreux souvenirs et informations dont elle dispose, sur le vieux Heemskerk avec ses anciens habitants.
Elle nous transmet ce patrimoine immatériel culturel et assure ainsi sa sauvegarde. C’est formidable.
Malheureusement elle est morte ce printemps.
Puis, en 1967, la famille a quitté le village de Heemskerk pour s’installer à Assendelft (Pays-Bas) où ils avaient repris l’entreprise d’élevage de Tinus et Nora Kroon-Seignette ; cette entreprise se trouvait à la (digue) Zeedijk 13. Quelques années plus tard, ils ont fait construire, à côté de la ferme, une étable moderne à stabulation libre et une maison d’habitation.
La maison paternelle a été démolie en 2012 pour faire de la place à une authentique ferme traditionnelle qui pouvait servir
d’habitation à deux familles.
Après quelques années, l’entreprise de Jan a été contrainte par la municipalité de cesser son activité, car la ferme devait être démolie pour faire de la place à de nouvelles constructions. La famille a donc déménagé et s’est installée à Schoorl (Pays-Bas) où elle a repris une autre entreprise d’élevage. C’est leur fils Theo qui poursuit toujours les activités de la ferme.
Jan et Eva ont eu 6 enfants :
Joke, Jan, Theo, Mariëtte, Monica et Fred.
Ils ont actuellement 8 petits-enfants.
Information
La France
Généalogie